Paradigmes
Volume 1, Numéro 2, Pages 15-27
2018-05-15

Un Exemple Parfait D’hybridité : Meursault, Contre-enquête De Kamel Daoud

Auteurs : Saïdi Saïd .

Résumé

Kateb Yacine, optimiste visionnaire considérait que « le français est un butin de guerre », continuant ainsi l’idylle, à l’infini, et sans doute définissant déjà l’hybridité, de fait, de la littérature algérienne d’expression française. Les jeunes écrivains, enfants des indépendances, ont porté à fructification inouïe, cet admirable butin de guerre, prouvant que cette littérature n’a pas consenti à « mourir jeune », animée qu’elle est par cet état de perpétuelle jouvence. Fécondité bienfaisante, même venant de l’autre rive : « Une langue se boit et se parle, et un jour elle vous possède ; alors elle prend l’habitude de saisir les choses à votre place, elle s’empare de la bouche comme le fait le couple dans le baiser vorace. » (Daoud, p. 17). Au-delà de la polémique médiatisée à outrance – c’est de bonne guerre – déclenchée par Meursault, contre-enquête de Kamel Daoud, l’œuvre illustre encore une fois cette symbiose des peuples, semblables dans leurs aspirations, mais divergents dans les conspirations dont ils ont été et sont victimes. Certes, la colonisation demeure une thématique récurrente, sans les passions sournoises et conflictuelles. Mais la littérature, l’écriture, la pensée, permettent de retrouver une quiétude invraisemblable, celle de vivre, de vaincre les lourds héritages qui n’en finissent pas de construire le présent. Kamel Daoud relève le défi, à l’heure des printemps arabes, des grands bouleversements géopolitiques et géostratégiques, de suturer toutes les plaies et de solder tous les comptes avec le passé. Jusqu’à cet appel final, véritable cri cathartique, prémonitoire : « Je voudrais, moi aussi, qu’ils soient nombreux, mes spectateurs, et que leur haine soit sauvage. » (Daoud, p. 153).

Mots clés

colonisation, œuvre, écriture, héritage, hybridité, présent