Bulletin du Service Géologique de l'Algérie
Volume 5, Numéro 1, Pages 49-68
1994-06-01

Le Magmatisme Cénozoïque Du Hoggar: Une Synthèse Des Données Disponibles . Mise Au Point Sur L'hypothèse D'un Point Chaud

Auteurs : Ait-hamou Farida . Dautria Jean-marie .

Résumé

Le bombement du Hoggar est caractérisé par une anomalie gravimétrique fortement négative de grande amplitude (juqu à-120 mgal) et de grande longueur d onde (600 Km). Cette anomalie résulte de l existence d’un manteau lithosphérique anormalementlégersitué àl’aplombdu bombement.Cet allégement serait en partie, associé à la phase distensive qui a affecté toute l’Afrique centrale et occidentale, au Crétacé inférieur. Il résulterait alors d’un amincissement de la lithosphère et du remplacement partiel du manteau lithosphérique par du manteau asthénosphérique plus léger et fertile. Au bombement du Hoggar est associée une intense activité magmatique cénozoïque. Celle-ci a débuté à l’Eocène moyen par l’épanchement,au Sud de l’Amadghor,d’un grand volume de basalte tholéïtique (massif du Taharaq). Ce massif est exactement situé au sommet de l’anomalie gravimétrique. Les autres districts volcaniques du Hoggarsontsituéssurlesflancsdel’anomalie.Ilssont plus récentsetd’affinité alcaline.L âge du déclenchement de leur activité (entre le Miocène et le Pliocène) varie en fonction de leur position par rapport au sommet de l’anomalie des districts les plus récents - Tahalgha, Eggéré et Adrar N’Ajjer - en sont les plus éloignés). Cette évolution spatio-temporelle associée au changement d’affinité des laves émises, évoque le modèle de point chaud proposé par Wyllie (1988) (volcanisme tholéïtique à1’apex du point chaud, volcanisme alcalin à la périphérie). Dans le cas du Hoggar, ce point chaud se serait développé alors que la plaque était statique. Les données géochimiques et isotopiques montrent, par ailleurs, que les laves, qu’elles soient tholéïtiques ou alcalines, résultent d’un einteraction entre deux sources,l’une appauvrie et l’autre enrichie .La première correspond vraisemblablement au manteau lithosphérique supérieur (voisin de celui remonté sous forme d’enclave par les basaltes alcalins les plus récents), la seconde à des matériaux asthénosphériques. Dans l’hypothèse d’un point chaud,ces derniers pourraient appartenirà un panache mantellique. Cependant, compte tenu du fait que la partie inférieure de lalithosphère du Hoggar a vraisemblablement une signature isotopique et géochimique asthénosphérique, en raison des évènements distensifs crétacés, la source enrichie pourrait bien être la lithosphère inférieure. Les données paléomagnétiques les plus récentes montrent par ailleurs que la plaque Afrique, au niveau du Hoggar, a été presque statique entre -50 et -40 Ma (vitesse de déplacement inférieure à 0,5 cm/an). C’est justementdurant cette période que s’estdéclenchélevolcanisme tholéïtique du Sud Amadghor.Si l’on retient l’hypothèse “ point chaud , l’absence totale d’activité tholéïtique avant -45 Ma et après -35 Ma, du moins en surface, suggère que les vitesses de déplacement de la plaque avant et après l’Eocène inférieur-moyen (>2cm/an) sont trop grandes et/ou que les lithosphères au SW et au NE du Hoggar sont trop épaisses, pour que le point chaud puisse s’exprimer par du volcanisme. Il est possible aussi que le point chaud Hoggarcorresponde, non pas à un vrai point chaud, mais à une perturbation thermique de moindre importance (un courant convectif, par exemple), dont l activité se serait accrue en raison du quasi-statisme de la plaque entre -50 et -40Ma.Cette perturbation thermiques serait alors exprimée à la manière d' un point chaud grâce à la présence d’une lithosphère inférieure fertile. Dans les deux cas,le volcanisme alcalin mio-plio-quatemaire résulterait de la résorption tardive d’instabilités gravitatives (par un mécanisme vraisemblablement de type diapiriqoe) générées par l’injection et la percolation de fluides asthénosphériques en base de lithosphère.

Mots clés

Magmatisme intra-continental, tholéïte, basalte alcalin, bombement lithosphérique, point chaud, Hoggar, Afrique